..... Après n'avoir jamais été avare de mon temps pour les autres et pour une certaine idée d'un monde meilleur, j'ai décidé par instinct de survie de m'occuper un peu de moi . C'était en 80 tous les malins avaient déjà installé leurs arrières qui s'avèrent aujourd'hui bien utiles pour leur petite retraite peinarde, mais moi je ne pensais qu'à me tirer de l'alcool et de la came juste à temps : le sida allait faucher une bonne partie de mes ex.copains encore plus imprévoyants que je le fut. Je trouvais par je ne sais quel sursaut le punch de me détourner du pire qui faucha homos et hétéros, femmes ou hommes. Ce fut une véritable guerre que je menais pour me tirer vers l'inconnu, la fuite éperdue dont personne n'imagine les douleurs qui transpercèrent mon corps de haut en bas, de part en part hors institution officielle dans le dénuement le plus complet et l'indifférence qui est la compagne la plus fidèle....Je m'en sorti puisque je suis encore là pour vous le raconter avec à mes côtés une femme-enfant qui était dans un état encore plus complexe que moi. Je ne vous bombarderai pas des détails de l'hiver 80-81 où nous nous " chauffions " avec une cheminée qui faisait ce qu'elle pouvait pour faire monter une température négative : il fait froid en Haute-Provence lorsque le Mistral souffle pour chasser les nuages gorgés de neige. Une fois par semaine nous allions à la douche publique de Apt; que contez-vous " révolutionnaires " d'opérette sur la vertue d'une vie modeste : c'est l'enfer qui vous lèche l'âme et détruit ce qui reste de votre humanité !! Comment reprocher à celui qui est tombé de vouloir sa revanche ? Son morceau de Paradis au plus vite et pas par n'importe quel moyen ! Les mains amis deviennent rares, la misère semble contagieuse aussi. Ma haine de classe n'a jamais ( pour le moment ) dépassé la simple dénonciation car pourquoi échanger son malheur avec un autre ? Mais mon D. pourquoi m'avoir imposé de telles épreuves et une telle humiliation ? Mes mains aux doigts si souvent blessés sont les témoins de mes supplications et de mon désarroi; il parrait que la rentrée verra se bouger mon avocat pour se battre et me rendre justice et honneur. En attendant le gang qui m'a dépossédé se gamberge d'avoir mis à terre ce " juif " si fragile et naïf. Je répetterai en boucle, jusqu'à la nausée cette forfaiture impunie depuis plus de deux ans; le temps judiciaire ne serait pas le temps humain; quel extraterrestre s'est donc chargé d'en rédiger les codes ? Aujourd'hui dimanche je tenterais de ne pas faire vivre par ricochet l'angoisse qui me tenaille à Caroline. J'attend sans cesse un geste, un mot , une pensée d'Amour qui éclairerait ce ciel si sombre de mon univers.....