.....Sous le regard bienveillant de Picasso tout juste remis à mes pinceaux j'avais laissé plusieurs gouaches sur panneau dans une petite galerie aujourd'hui disparue tenue par Madame Renée Laporte; cette femme et son mari, décédé alors, avient été des grandes figures de la Résistance et avaient caché pendant la guerre celui qui devint le meilleur ami de mon père le célèbre compositeur Norbert Glansberg auteur de musiques pour Piaf ou Montand. Juif et allemand de surcroît il n'avait le choix que de se planquer ou d'être raflé par les sbires de Vichy ou la Gestapo.Après la guerre devenu compositeur il accompagna au piano les plus grandes vedettes de l'époque et anima au clavier le cabaret que mes parents créerent à Saint Germain Des Prés à Paris " L'Arlequin " où se produit entres autres artistes un certain Léo Ferré. Les souvenirs s'envolent avec le temps si personne ne s'en fait l'écho et je suis heureux de rappeler ce morceau d'Histoire qui fonde le milieu où je vis le jour. La musique qui m'accompagnait dans mon travail immanquablement a déserté mon atelier; depuis le suicide de P. je n'arrive plus qu'à supporter le silence pendant mes heures de labeur; un véritable blocage m'empêche d'enclancher le lecteur de cassettes qui m'étaient si chères : les Pink Floyds, Stravinsky, Johnny Cash restent muets sur leurs galettes argentées. Une petite musique intérieure a probablement remplacé leurs présences; mes couleurs occupent désormais tout l'espace de mon imaginaire ainsi que ces missives quotidiennes où je ne cache rien de mon désarroi.......