.....Je dormais dans ma camionnette en attendant que la boulangerie de la Rose ( Marseille ) me fournisse les pains complets encore chauds sortis tout juste du four; c'était au début de mon magasin " Sesam " de produits bios à Apt en 83-84. Cette folie qui me faisait faire ces 100 bornes aller-retour un matin sur deux s'accompagnait ensuite d'une virée chez des producteurs de fruits et légumes et d'oeufs au pied des Alpilles. Une fois tout installé j'ouvrais la boutique vers les 9 heures; les clients affluaient; ce pari fou d'ouvrir un tel commerce dans une petite ville s'avéra être une idée géniale : le coin ( le Luberon ) devint par la suite LE repaire multinational des bobos chics, droite et gauche caviar se partageant ruines et hameaux pour en faire leur petit paradis provençal....Une fois de + ( après l'imprimerie des années 70 ) j'aurai pû faire fortune mais j'abandonnais en 88 cette mine d'or à mon ami-vendeur qui fit-là l'affaire de sa vie en même temps que connaissance avec celle qui devint sa compagne et la mère de ses jumeaux....Aucune photo en ma possession ne me rappelle ces années où me sponsorisant moi-même je devins un as de la course à pied : sous un soleil de plomb, sous la neige ou sur les pentes les + abrupts, rien ni personne ne pouvaient rivaliser avec ma volonté d'acier trempé, à en pisser le sang tant ma discipline macrobiotique m'incitait maladroitement à abuser un peu trop sur tamari et gomasio sources à mes yeux de mon endurance exceptionnelle.... L'amour ne tenait qu'une place secondaire en ces années d'ivresse sportoascétique : ici ou là, lorsque l'envie me prenait, je choisissais l'alcove qui voyait mes désirs s'assouvir sans attache ni promesse.....libre et sec comme la terre dénudée où j'aimais affronter Dame Nature en combat singulier. Voilà comment je passais ces années 80 me moquant de tout ce qui pouvait entraver ce qui serait bientôt mes retrouvailles avec ma véritable vocation : la peinture. Mon corps et mon esprit disponibles pour une aventure qui s'avera plus impitoyable que la pente mortelle de mon cher Ventoux.........